Dans sa série de portraits consacrés aux professionnels de l'audiovisuel, l'IMAAT a recueilli cet échange avec Jérome Trehorel, Directeur général du célèbre Festival des Vieilles Charrues.
En quelques lignes, pouvez-vous nous présenter votre parcours ?
Pour commencer j’ai fait une BAC ES, suivi d’un DUT Techniques de Commercialisation, option Techniques de Communication, car j’étais passionné par ce secteur mais personne de mon entourage n’y travaillait. Ça attisait ma curiosité et je souhaitais voir si ce domaine pouvait me correspondre. Ça m’a beaucoup plus alors j’ai fait ensuite un diplôme européen en communication, suivi d'un stage chez France 3 Bretagne, puis j'ai été bénévole dans plusieurs festivals bretons et dès cette même année, 1998 : Les Vieilles Charrues. Je n’en suis jamais vraiment reparti car après mon bénévolat j’y ai fait des missions salariées liées à la communication, l’audiovisuel ou encore la gestion des droits d’auteur. Suite à ça, je me suis occupé des partenariats et des mécénats, on m’a également confié le service communication/presse, et depuis fin 2012 la direction générale. J’ai également travaillé sur d’autres festivals, comme Les Tombées de la Nuit, et dans l’évènementiel sportif.
A quoi ressemblaient vos missions dans ces différentes fonctions et quelles sont celles d'aujourd’hui ?
Elles ont beaucoup évolué. Pour le volet mécénat c’était aller démarcher des entreprises et faire en sorte de trouver des financements pour accompagner l’évolution du festival, là il y avait déjà un peu de management avec la gestion de deux grands services que sont communication/presse et partenariats/mécénat. C’était déjà intense, avec deux personnes qui rejoignaient le service quand le rythme s’accélérait, à partir du printemps, il fallait avoir une planification précise avec un retroplanning des différentes actions, savoir déléguer et avoir des points de vérification et d’accompagnement. C’était donc ma première vraie expérience de travail en équipe, et de direction. Sur la direction générale c’est donc la même chose mais x20, car il y a une vingtaine de services différents sur le festival et la vraie difficulté c’est de tous les accompagner, valider ou non les propositions, les budgets etc.
Justement, quels sont les enjeux de la direction d'un festival ?
Il faut comprendre ce que l’on a à valider, le service communication/partenariats c’est plus facile de part mon ancien métier mais valider des points de billetterie, de merchandising, de régie artistique ou technique, de plomberie, d’électricité, d’alimentaire, de bar, de programmation, etc, ce n’est pas simple car il faut beaucoup travailler avec les équipes pour comprendre les enjeux, les obligations, les risques, partager avec elles les orientations à mener et être en capacité de décider ; c’est le premier challenge à relever. Lorsqu’on a cette vision globale des équipes, il faut ensuite arriver à se projeter pour l’évolution du festival, c’est à dire lire l’évolution du secteur pour les deux ou trois années à venir, réussir à s’adapter à des contextes imprévus, comme le contexte sanitaire que l’on traverse actuellement ou l’impact lié aux attentats, qui a modifié beaucoup de choses en matière de sécurité et de secours à la personne. C’est une adaptation permanente pour être en capacité de fidéliser et surprendre le public chaque année, grâce à la programmation, à l’organisation envers le public et les bénévoles.
On organise une manifestation qui accueille 70 000 festivaliers par jour, 4 jours d’affilée sur un site éphémère entièrement construit, et déconstruit juste après. Cette construction de site comprend la partie scènes, la partie restauration/bar, la partie sanitaires et leur nettoyage, la partie parking, la partie camping, c’est donc beaucoup de services et beaucoup d’enjeux importants sur des sujets qui peuvent parfois paraitre anodins ou évidents, mais qui demandent l’implication de travail d’énormément de personnes. Une énorme machine qu’il faut réussir à guider pour que chaque année, 3e week-end de juillet, on ouvre les portes sans retard ! Un gros contre-la-montre avec une équipe de 14 salariés permanents, auxquels s’ajoutent les équipes techniques et les régisseurs intermittents qui font grandir les effectifs dès l’automne. En janvier on est une trentaine, au printemps une cinquantaine, et avant le démarrage du montage on est environ 70 dans les bureaux. 700 personnes travaillent directement embauchées par les Vieilles Charrues, et autour de 1 500 personnes sont prestataires ou fournisseurs. Ce sont plus de 2 500 personnes qui participent à l’organisation du festival avec 7 150 bénévoles, c’est donc quasi 10 000 personnes qui travaillent à son organisation. Beaucoup de monde, beaucoup de services à coordonner, et à accompagner pour le bon déroulement du festival.
Quels seraient vos 3 conseils pour celles et ceux qui, comme vous, veulent transformer leur passion en carrière ?
De l’écoute, notamment avec les équipes expertes dans leurs domaines.
Beaucoup de travail, il n’y a pas de hasard et les enjeux sont importants, surtout lorsqu'on accueille autant de personnes et qu’on engage sa responsabilité civile et pénale.
De la curiosité, toujours chercher et imaginer ce que l’on va faire demain, après-demain. Regarder autour de soi, aller sur d’autres évènements culturels mais aussi sportifs. L’autre jour par exemple je suis allé à Roland Garros pour voir les évolutions du site, les nouveautés et aller piocher des idées à droite, à gauche, pour apporter des nouveautés à notre propre festival sur les éditions à venir.
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